Article 30 : Besoin du "Nous"

Nous avons besoin des autres. 

Voilà une vérité bien déchirante dans notre société actuelle qui prône au contraire la liberté individualiste et entretien une concurrence face à nos semblables qui se veut toujours plus sans pitié…
Nous pensons à tort que, plus nous luttons face à l’autre, plus nous pouvons devenir forts et uniques. Mais tout ceci n’est que fantasme et apparence. Et je dirai même qu’en nourrissant cette croyance, nous devenons toujours plus fragiles et sans défense face à la vie.

Il est temps de revenir à plus de conscience sur notre fonctionnement humain et il est même urgent de se reconnecter les uns aux autres dans un but commun : celui de parvenir à être plus authentique et justement des Êtres singuliers et indépendants tout en étant en lien. Car soyons honnête, nous ne pouvons grandir sans une main tendue, nous ne pouvons accéder à la connaissance de qui nous sommes sans le miroir de l’autre et nous ne pouvons développer notre bienveillance qu’au contact d’une autre humanité que la nôtre. Et il n’y a aucune fatalité à tout ça. Au contraire, il n’y a dans toute cette approche que des opportunités pour devenir pleinement soi.

Il suffit de revenir à l’aube de la création de notre Être car ce besoin de l’autre est inscrit dès notre venue au monde : à la naissance, le bébé ne pourrait pas survivre si nous ne prenions pas soin de lui. N’oublions pas que nous naissons à la vie en étant sans défense et dans l’incapacité de pouvoir survivre seul. Le petit être que nous sommes au départ a besoin de soins alimentaires, d'hygiène, de stimulation intellectuelle pour croître, s’éveiller…et il a aussi un grand besoin d'amour. Un sentiment puissant et partagé avec son nourrisson par l’interaction des regards, des mots, du touché, de la présence humaine. Nous sommes nourris de tout ça depuis les premiers instants de notre existence in utero, puis à la naissance et ensuite tout au long de notre vie humaine.

Je pense que nous gardons en nous cette trace indélébile, cette vulnérabilité. Nous sommes faits de cet élan de dépendance au monde. Nous nous sommes construits comme ça. Et je pense même que nous sommes justement venus vivre tout ça en venant un jour sur terre car c’est à travers le besoin que nous pouvons comprendre les pièces du puzzle qui manquent à notre cœur afin de s’épanouir pleinement. Comment connaitre ce qui nous anime, ce qui nous inspire, ce qui nous manque, ce qui nous limite, ce que nous devons panser en nous, ce que nous pouvons développer et construire sans le lien à l’autre ? Nous sommes liés à la vie et à tout ce qui est animé par cet élan, cette énergie, c’est-à-dire que nous sommes liés à l’humain, aux animaux, à la nature …Tout ce qui est vivant. Et c’est en accueillant cette vulnérabilité de dépendance que nous pouvons construire pas à pas une indépendance d’amour en nous et vivre dans un équilibre partagé entre soi et l’autre pour avancer tous ensemble.

Nous ne quittons jamais ce besoin de l’autre mais nous nous obstinons à penser, au contraire, qu’il le faudrait pour arriver à vivre pleinement. Mais est-ce là un but à atteindre au fond ? Je pense que ce besoin s’accompagne, se transforme et s’exprime de façon différente depuis notre naissance et tout au long de notre vie : une fois que le jeune adulte a appris à se séparer de sa famille dont il a eu besoin durant la première partie de son existence, il part ensuite à la rencontre du monde extérieur pour construire sa propre vie et va alors développer d’autres liens relationnels en fonction de ce qu’il aura besoin d’apprendre et de nourrir en lui. Tout comme son propre cœur, ses failles et ses forces pourront enrichir et éclairer d’autres humanités.

Nous vivons dans une société qui prône sans cesse l’indépendance, la performance...du coup nous pensons que vivre heureux c’est être détaché des autres. Mais j'ai l’impression qu’à partir du moment où on aime que ça soit un lieu, une activité, une personne, un animal…il y a une certaine dépendance qui se crée à travers le lien. Et il suffit de le voir très simplement, comme un fil invisible qui anime une énergie d’amour entre deux pôles. Ce lien de dépendance peut se révéler d’une grande liberté lorsqu’il est bienveillant et constructif. Notre bonheur de vivre est ainsi alimenté par ces liens divers de la vie et qui nous aident petit à petit à être nous-même, véritablement. Il n’y a pas qu’une seule façon pour devenir nous-mêmes mais je pense qu’un des chemins à emprunter pour y accéder est l’acceptation de cette vulnérable dépendance dans laquelle réside aussi la capacité à être libre. Car ce sont dans nos liens d’amour que nous pouvons révéler notre plus profonde et authentique humanité. La reliance au cœur, le notre et celui de l’autre, donne un sens précieux à la vie.

C'est un leurre de penser que le non-attachement est une issue vers la liberté. La liberté d'Être s'acquiert par la reconnaissance de cette dépendance à toute forme de vie que nous côtoyons et qui nourrit notre compréhension de nous-mêmes. 
Cependant, comme dans tous nos comportements et sentiments humain, il reste important de s’interroger pour se comprendre. Et tout a une limite. Car tout a besoin d’équilibre. Et concernant ce besoin de l’autre qui demeure en nous, il est aussi important de mettre du sens sur la façon dont cela s’exprime à l’intérieur de soi. Pouvoir définir quel est notre besoin et pourquoi à travers cet élan de dépendance : est-il une nourriture pour notre âme et celle de l'autre afin de grandir mutuellement dans l’échange, de se soutenir, se protéger et s’accompagner ? Ou est-il seulement une succession d'attentes insatiables à travers lesquelles nous recherchons en vain notre sentiment d'existence ? La subtilité est là. Et notre devoir envers nous-mêmes et envers l’autre est de travailler sincèrement sur cette identification profonde qui se mêle inévitablement à nos blessures humaines. 
Dans tout comportement humain, il y a des éléments importants à mettre en sens car nous demeurons des êtres en perpétuel construction, réparation et évolution. Si le besoin de l’autre est un besoin de partage et de cheminement pour avancer ensemble dans la vie et sa quête de sens, nous avons tout à y gagner. Mais si le besoin implique une dépendance pour vivre à travers l’identité de l’autre en reniant la sienne cela devient alors un bonheur erroné qui ne cherche inconsciemment qu’à combler nos manques grâce à l’extérieur...
Il faut alors parvenir à dialoguer avec son cœur pour définir le besoin de l'autre afin que cet attachement ne fasse pas mal, ni à soi, ni à l’autre. Pourquoi ai-je besoin de l’autre aujourd’hui ? Pour me nourrir ou chercher une légitimité d’existence ?

L'autre doit pouvoir être un soutien comme nous pouvons l’être à notre tour pour lui dans le but commun de s’encourager et s’épauler et pouvoir ainsi construire un amour sécurisant intérieur. C’est en s’offrant ce cadeau que nous serons des Êtres capables d’amour pour soi, pour l’autre, pour la vie. Si nous parvenons à être autant heureux seul qu’en présence de nos semblables, nous pouvons alors avoir besoin de ceux que nous aimons en toute liberté, sans avoir peur d’être fragilisé par ce lien/besoin. Car si l’être humain n’est pas fait pour vivre seul, c’est sûrement un leurre de se dire qu’il n’y a aucune dépendance dans l’attachement.

N’oublions jamais cette fragilité qui nous a animé le jour de notre naissance car nous ne serions pas là sans le prendre soin de cet autre soi-même qui a pu à son tour continuer à apprendre la bonté de son cœur en prenant soin de nous. N’oublions pas que cette petitesse de notre Être a aussi nourrit le grand être humain en face de nous par la dépendance de notre vie qui a pu permettre un échange d’amour mutuel.
Souvenons-nous que les petits et les grands avancent ensemble, développant ainsi leur identité singulière tout au long du chemin car c’est bien dans cette interaction, dans cette connexion et dans cette dépendance que se trouve toute une vie commune à partager…

J’ai besoin de toi,

J’ai besoin du « nous »,

Pour atteindre l’amour inconditionnel de mon Être.


 

Charlotte, septembre 2022




Dessin de Leïna Fort Vergori



Article 29 : Dans mon monde


J'aime une façon entière de ressentir la vie :
- élucider les épreuves qui nous percutent,
- donner du sens à nos pensées énigmatiques,
- éprouver le désordre des sentiments humains,
- se heurter aux moindres détails de notre expérience terrestre pour en éprouver toutes ses leçons d’apprentissages...

Ma vie pourrait se résumer de cette façon : un tsunami émotionnel faisant déborder mon cœur à chaque instant et me rappeler dans une certaine joie mêlée de douleur que je suis belle et bien vivante.

J’essaie chaque jour de tenir bon en faisant le choix de l’authenticité. Je veux cette vérité d’existence comme un serment d’amour que je fais à mon cœur et aussi à l’autre. Un choix de vivre vrai, dans la profondeur de tout ce que je côtoie afin de comprendre le monde, la vie et pouvoir partager tout ça avec d’autres cœurs humains. 
Je veux interagir et accueillir avec un courage réciproque les relations qui se présentent à éprouver. Pour ne pas avoir de regret, pour partir de ce monde avec des souvenirs pleins le cœur, pour fermer mes yeux sur l’étreinte de l’amour mutuel serrant chacun de nos cœurs humains avant de s’en aller…
J’aspire à la construction de mon Être tout entier, en un seul morceau, sans masque, ni mille visages pour grandir en conscience afin d’atteindre le véritable chemin de mon cœur, cette voie unique qui peut révéler à celui qui l’emprunte, les milliers de secrets précieux de son âme…avant que la vie ne s'éteigne pour de bon.

Ce matin semble identique à hier et pas moins que demain. Cependant, à la lueur de l’aube, le jour est à présent plus fatigué que jamais. Mon cœur est endolori de n’avoir pu s’échapper dans les bras de la nuit ni se réfugier dans un sommeil serein. Ce matin il crie encore dans un dernier soupir : « je t’en prie, ne m’oublie pas. » Il parle au monde. Désespéré il parle aussi à ces êtres aimés que les illusions de la vie ont fini par éloigner.

Le lien à la vie est douloureux car une fois incarné sur cette nous perdons l’unité. Le lien à l’autre est déchirant car l’amour ne vibre jamais au même niveau. Cependant, notre condition humaine est précieuse pour comprendre qui on est. Et l’amour est une nourriture indispensable à la survie de notre âme sur terre. Mais c’est aussi notre humanité fragile et apeurée qui retient notre véritable nature rendant notre lien à la vie pleins de difficultés et le lien à l’autre pleins de souffrance.

Je me souviens de ces jours lumineux et pleins de douceurs durant lesquels chacun de nos cœurs avait réussi à inventer « un cœur pour un cœur » dans cet élan de l’amour naissant. Car c’est ça aimer. Trouver le chemin de réunion où nos deux cœurs peuvent se parler et s’écouter. A deux, ils inventent une route, un lien d’amour, une intensité commune qui raconte la même histoire d’amour : un nouveau cœur singulier pour unir nos deux cœurs ensemble. Sur cette route, on se tient la main très fort pour se sentir invincible durant toutes les saisons de l’existence, les douces comme les plus rudes. Car notre cœur est plus grand, plus courageux et plus robuste lorsqu’il est fait de deux humanités : alors le bonheur prend nos deux noms, la douleur a plus de bras pour la consoler et nos corps aux pluriels se positionnent ensemble pour construire notre relation telle une demeure à protéger. Il y a aussi plus de larmes et de sourires à partager pour arroser le jardin de la vie et fabriquer des arc-en ciel. Il était beau ce temps-là.

Mais un jour nous n’avons plus raconté la même histoire d’amour. Ton cœur est parti. Et le mien s’est perdu. Il est resté sur la route que je pensais avoir bâti dans la réciprocité de notre amour singulier.
Aujourd’hui, dans ma lutte intérieure, j’essaie de convaincre mon cœur que ce n’est pas grave si l’amour prend des chemins différents. Il a quand même existé. Je ne sais pas si cela consolera mon cœur d’avoir trop aimé car c’est tout son monde qui s’écroule à chaque fois…mais il m’écoute courageusement lui murmurer tout doucement des jolis mots d’existences et pleins d’humanités. Ces mots qu’ils aiment entendre car ils résonnent dans chaque battement qui le maintienne en vie. Et aujourd’hui ce sont les mots qui restent tout près de mon cœur car ils ont le même langage. Et le même amour.

Avant de partir, je voudrai te partager une dernière fois avec mes amis les mots, ce que le son des battements de mon cœur essaie de raconter ;

- Dans mon monde, la nature m’enivre de toute sa beauté, je la ressens dans tout mon Être : les rayons du soleil me donnent l’impression d’être enlacée passionnément, le chant des oiseaux me connecte à l’âme du monde dans sa pureté la plus incroyable, le vent me caresse les cheveux, le visage, les bras et sa douceur fait exploser mon cœur de tendresse. 

- Dans mon monde, l’amour a une résonnance qui n’est pas perceptible par nos sens humains. C’est une sensation aussi forte et fragile que nos yeux ne peuvent pas voir mais que le cœur peut ressentir. C’est un son que nos oreilles ne peuvent entendre mais c’est une vibration qui enveloppe tout l’Être et que seul notre esprit peut véritablement écouter et comprendre.

- Dans mon monde, quand on ouvre son cœur pour le confier à une personne aimée, on devient tout petit : on se montre sans se cacher et on apparait tout brisé devant l'autre. Alors, dans le flux de l’amour partagé, on découvre dans son regard qu'on existe. Et on apprend à l’autre aussi combien son existence est précieuse. On grandit ensemble, dans les joies et dans les peines car l’amour, c'est quand on partage tout, et que la communion ne vole rien de nos jardins secrets : l’amour, c’est s’accueillir mutuellement avec toute la bienveillance du cœur.

- Dans mon monde, aimer c’est être face à la liberté de l'autre sans jamais se sentir seul, c’est s’aimer autant, avec la même musique car là où la blessure creuse, brusquement surgit l'amour : en devenant inséparables, on est plus fort.

Ma vie rime avec intensité : c’est ça mon monde...
Et en arpentant la terre chaque jour, j’apprends à mes dépends que la tragédie de ce monde n’est pas la mort mais le manque d’amour pour soi, pour l’autre, pour la vie dans toute sa réciprocité et son unité la plus pure.
L’humain ne sait pas écouter son âme pour vivre un amour réciproque avec la vie.
L’humain ne sait pas écouter son cœur pour vivre l’amour dans toute sa grandeur avec un autre cœur que le sien…


Charlotte, août 2022



(Photo Charlotte Vergori)

Article 28 : " Vivere "

 

Un jour, l’enfance vient à passer et nous devenons adulte. Alors se présente à nous deux possibilités pour poursuivre le chemin de notre vie. Un choix à faire entre deux regards, entre deux attitudes afin de se positionner, de s’engager dans notre existence terrestre.

-      Il y a les Hommes qui ne se posent pas de question, qui se contentent des idées apportées par l’éducation et la société, se laissant hypnotiser par le bruit extérieur et tombant le soir d’épuisement…pour recommencer ainsi la même rengaine le matin venu. Telle une boucle infernale à l’allure rassurante car, parfois, nous n’avons pas le courage d’oser ni la force de faire autrement…

-      Il y a les Hommes qui s’interrogent sur l’univers, qui sont chaque jour en quête de sens et qui tentent coûte que coûte d’élucider le mystère de leur présence sur terre. Peu importe le prix à payer. Peu importe le nombre de larmes versées. Car pour ces gens-là, chaque nouveau matin est une promesse. Chaque seconde est une chance d’expérimenter la vie et la profondeur de leur Être.

Dans notre société actuelle, nous nous contentons bien souvent de survivre : nous prenons les grands axes de notre vie sans risquer de dévier sa trajectoire, ou que très rarement…Dans cette posture, nous « vivons au minimum » par peur de se retrouver face à nous-mêmes, face à nos pensées sombres et face à nos limites. Sûrement parce-que dans l’évitement, nous avons l’impression de contourner des chemins dangereux et donc des moments de souffrance…quitte à ne pas être pleinement vivant.  

   -      Pour ceux qui ont adopté ce mode de survie pour Être dans le monde, les rêves d’avant ont vieillis et la vie est devenue une routine grisée. Ils se contentent d’une obscurité d’existence partiellement éclairée.

  -      Pour les autres qui choisissent des routes moins linéaires et plus inconfortables, les rêves d’enfants sont des objectifs à atteindre donnant corps à leur existence, quand bien même cela impliquerait de ne jamais pouvoir les réaliser si la mort devait les attraper avant…ils auront au moins vécu pour les tenter et les chérir de tout leur cœur.


Ce matin, je regarde par la fenêtre le bel arbre majestueux au centre de mon jardin. Soucieuse, mes yeux contemplent chaque feuille qui se mettent délicatement en mouvement dans la douceur du vent qui vient les faire danser. Et mon âme se souvient : elle veut vivre avec de la passion dans le cœur. Chaque jour. Quitte à prendre le risque d’en souffrir souvent.
Quel sens peut avoir la vie si nous jouons sans cesse à cache à cache avec elle ? Comment écrire notre histoire singulière si nous ne la laissons jamais nous surprendre par ce qu’elle a de trésors à nous conter, nous enseigner et si nous ne prenons pas le risque de la laisser nous étourdir, nous habiter de tout son mystère ?

J’en suis sûre à présent : je suis venue au monde avec ce cœur-là, lors d’un hiver enneigé. Un cœur ouvert avec toute sa vulnérabilité mais qui veut garder en lui le courage d’apprendre et qui ne veut jamais arrêter de questionner la vie. Chaque battement qui tambourine dans ma poitrine souhaite interroger les autres et aspire profondément à les aimer. Mon corps, ce temple courageux qui abrite mon esprit, veut accueillir chaque émotion en l’invitant à l’intérieur de mon Être…espérant que cette route me révèle, pas à pas, les mystères de mon âme avant de quitter notre terre.

 

Aujourd’hui je fais ce serment : je te choisis La vie.

Je veux t’assumer de toute mes forces et t’aimer tant que je peux respirer ici-bas.

Puisque tu as la générosité de couler dans mes veines, je te promets de m’engager chaque jour avec toi.

Et jusqu’à ce que ma mort laisse la place à un autre être-humain

qui pourra à son tour être honorer de ta présence en lui.

Une présence aussi précieuse qu’éphémère…

 

Charlotte, juillet 2022



Photo Charlotte Vergori



Article 27 : Fil d'or

🍀 Je sens que je touche parfois cette limite dangereuse qui pourrait me faire sombrer dans une mort de moi-même pour toujours. L’instabilité de l’existence semble nous demander en permanence une énergie surhumaine afin de pouvoir surmonter le mystère qu’est notre vie. Et aujourd’hui je peine…Mon cœur cède à la vie.

🍀 Nous rencontrons tous cette limite en nous certains jours de brouillards, lorsque surgissent de nulle part, nos difficultés existentielles. Dans ce monde de perdition intérieure, il demeure une vie d’errance pour les humains vulnérables que nous sommes…Une vie éteinte de tout mouvement d’amour. Le corps et le cœur sont alors à la recherche d’une lueur d’espoir capable de les hisser hors du noir. De les sauver de la douleur de vivre.

🍀 Lors de cet égarement qui me fait perdre la connexion au bonheur, mes yeux regardent le sol…et dans un mouvement de désespoir ils finissent par rencontrer mes mains. Je les regarde. Elles sont vivantes. Et je réalise qu'elles vibrent à chaque touché bienveillant. Du bout de leurs doigts, elles peuvent transmettre des frissons dans tout mon corps. Des frissons de vie. Mon corps est fatigué. Mais mon cœur le porte...et bat encore. La souffrance ne m’a pas encore tué. Je me dis alors, qu’il doit être possible d’en faire quelque chose.

🍀 Lorsque je commence à éprouver cette noirceur de notre existence terrestre à l’intérieur de tout mon Être, il y a ce fil invisible que mon cœur perçoit péniblement, douloureusement...mais qui est là : un fil d’or qui retient ma vie...précieusement. Surtout durant les tempêtes vertigineuses de toute existence humaine.

🍀 Ce fil est telle une corde solide que mes yeux ne peuvent voir mais que je sens tenace depuis ma venue au monde : il me tire vers le haut malgré le poids de ma souffrance qui alourdit mon corps et mon âme. Grâce à sa force contenante, mon coeur s'accroche à la vie...et y croit. Même quand je crains le noir. Alors, j’entends à nouveau sa musique dans ce qu’elle a de plus majestueuse.

🍀 Aujourd’hui, à nouveau accablée par la souffrance de l’expérience terrestre, je me replie sur mon cœur. Et c’est dans cet abandon que je commence à comprendre : je réalise que l’essence de ce fil d’or est l’Amour. Ce sentiment est à la base de tout : il est ce qui fait naître notre âme, ce qui la nourrit et ce qui nous rend éternel. Sur terre, il est ce chemin d'espérance pouvant panser nos blessures humaines.

🍀 Croire en la vie...Toujours. En son infinitude, aux multiples possibilités qu’elle offre mais que nous ne voyons pas toujours du premier coup...


Accrocher son coeur au fil d’or, le confier à l’Amour...
Car lui seul pourra, à jamais, prendre soin de lui.


🦋 Charlotte, Juin 2022 🦋

 


* Photo Charlotte Vergori

Article 25 : Les soins palliatifs

 ✏️ Les soins palliatifs ✏️

Une unité de soins pour les personnes en fin de vie et dont le nom semble maudit, tabou...

Et pourtant, un projet de longue date pour mon coeur de soignante mais qui, je peux le comprendre, interroge tellement les gens qui m'entourent ou que je croise :

❔ - C'est pas gai votre travail...

❔ - Comment faites vous pour travailler "là dedans..." ?

❔ - Il faut être fort..

En fait, il faut être soignant...et surtout arriver à continuer et perdurer dans le "prendre soin" peu importe le service dans lequel on exerce aujourd'hui. La force est là...une force qui réside au coeur même de la fragilité. C'est à dire, qu'en dépit des conditions inhumaines dans lesquelles le secteur des soins est plongé depuis tant d'années, il faut persister et continuer d'être un soignant investi, engagé et conscient de sa responsabilité lorsqu'il enfile sa blouse au vestiaire. Et ne jamais cesser de mettre du coeur dans nos mains et nos gestes d'accompagnant malgré la fatigue et les désillusions de notre quotidien professionnel.

✨ Et puis, concernant mon nouvel emploi en services de soins palliatifs, contre toute attente, il n'y a pas que de la tristesse. J'y apprends aussi la joie et la vie...comme quoi, nos représentations, nos à priori, nos idées toutes faites sont à réinterroger, à dépoussiérer, à réouvrir...toujours. Ouvrir sa conscience sur l'immensité et le mystère qu'est la vie sans l'emprisonner, ni la restreindre, ni l'étouffer mais en gardant l'oeil et le coeur alerte d'un nouveau regard à poser sur chaque situation et chaque personne.

🌸 Depuis 1 mois, j'ai integré un nouveau service le coeur pleins d'espoir de me nourrir de nouvelles découvertes.

🌸 Depuis 1 mois, j'apprends à être une nouvelle soignante : mes 10 ans de diplôme perdent leur ancienneté à chaque nouvelle entrée dans un nouveau service...

🌸 Depuis 1 mois, je suis redevenue une "jeune infirmière", une petite nouvelle, en toute humilité...car j'ai tant à apprendre...

✨ Je découvre dans ce service combien l'essentiel de la vie est remis à l'honneur...un essentiel que l'on perd dans nos vies humaines surmenées, routinières et en perte de sens. Surtout lorsque nous sommes en bonne santé pour porter notre corps qui demeure pourtant si fragile...Dans ce service, les liens avec nos proches, le pouvoir du moment présent et l'importance des petits bonheurs sont remis au coeur de chaque journée de vie.  

✨ J'apprends qu'il est si délicat mais tellement important d'accepter qu'il n'y a pas d'âge pour mourir mais qu'on a juste le moment présent pour vivre...Qu'en acceptent que nous n'ayons pas de main mise ni sur la vie, ni sur la mort, on peut devenir des soignants qui ne luttent pas contre un sentiment d'injustice mais qui ouvrent leur coeur à l'accompagnement profond et de paix dont le patient a tant besoin dans le tumulte de ses émotions si intense à ce stade de sa vie...Le patient en soins palliatifs a besoin d'accueillir sa vie qui s'estompe...Mais, justement, une vie qui est encore là. 

✨ Et il n'y a pas que la mort comme sujet central dans mon nouveau service de travail : il y a avant tout des humains éphémères, ce que nous sommes tous...et chaque jour. Mais nous sommes surtout des Êtres qui SONT...jusqu'à la dernière seconde. Cet accompagnement si bouleversant est un hymne à la vie...et l'infirmière que je suis a l'honneur et tellement de gratitude de pouvoir prendre soin de la vie si précieuse de chaque patient, chaque humain, qui passeront dans ce service si particulier et presque hors du temps...

✨ S'il n'y a pas que la mort comme sujet récurrent au coeur des soins palliatifs c'est parce-qu'il y a aussi l'amour...oui, avant tout, dans mon service de soins, on accueille et on partage l'amour. J'ai été témoin de tellement d'échanges de gratitude et d'affection entre les patients et leur proche...des souvenirs gravés...alors je refuse de penser que la mort interrompt ce merveilleux sentiment qu'est l'amour et qui unit si fort les gens de façon invisible car non palpable mais bien réel et si puissant. La mort emporte un corps de chair mais jamais cette énergie qu'est l'amour et qui continue et continuera de circuler et de vivre d'une façon ou d'une autre.

✨ Ma passion pour ce métier et pour l'humain continue de me pousser à oser découvrir des nouveaux chemins professionnels...et à cheminer en tant qu'infirmière mais surtout en tant que personne...🙏

☀️ C'est parti 🍀 pour une nouvelle aventure professionnelle et surtout humaine ☀️


🦋 Charlotte 🦋 (06/05/22)


=> Je pense à mon ancien travail et surtout à l'équipe que j'ai dû quitter il y a un mois pour ouvrir cette nouvelle porte...vous continuerai de me manquer mais j'emporte avec moi tous les trésors que vous avez déposé dans ma vie professionnelle. Je ne vous oublie pas 🙏




Article 24 : Émotionner

Les émotions sont généralement perçues comme une tempête imprévisible de notre intérieur… 

Au cours de nos jeunes années, le monde des adultes nous explique qu’il faut à tout prix contrôler et maitriser nos émotions. Elles semblent représenter une menace et un danger venant bousculer notre quotidien routinier bien ordonné.

Les émotions apparaissent tel un adversaire redoutable qui nous fait perdre pied. Elles nous dérangent car l’humain que nous sommes a un besoin très fort de contrôle sur tout. Ce contrôle nous donne l’illusion de mener à bien chaque journée de notre vie sans perturbation.
Mais cette représentation est un leurre qui nous emprisonne dans une existence superficielle : nous contournons le mouvement de la vie qui est en nous en évitant de plonger dans notre partie la plus profonde et la plus vulnérable…une partie accessible seulement à travers le chemin de nos émotions.

-          -     En voulant nous protéger de nos émotions, nous sommes dans l’évitement de tout ce qui est vivant et qui nous nourrit.

-          -     En voulant nos protéger de nos émotions, nous faisons le sacrifice de ce que nous avons de plus précieux en l’instant présent : notre vie.


Nous utilisons différentes façons de communiquer au quotidien en fonction de nos attraits : la voix, la musique, la peinture, l’écriture, le silence, la technologie
Mais il y a une communication riche d’informations et de compréhensions sur la personne que nous sommes : il s’agit de la communication des émotions. Et elles ont tant à dire ! A mon sens, cela va même plus loin : l’émotion est un langage pour ETRE dans le monde. Elles sont au cœur de tout et elles sont ce qui permettent la naissance de nos autres modes de communication. En effet, nos émotions génèrent une énergie qui fait naitre le langage de la vie sous toutes ses formes. Elles sont :

-          -     au cœur des mots dont la résonnance de notre voix viendra toucher notre cœur,

-          -     au cœur du son des notes de musique qui va venir toucher notre âme,

-         -      au cœur des pigments des couleurs picturales dont le tableau viendra accrocher nos yeux,

-          -     au cœur d’un livre dont l’écriture transportera nos pensées vers milles destinations,

-          -     au cœur d’un silence dont la profondeur viendra parler de la vulnérabilité de l’être,

-          -     au cœur de la technologie qui peut relier des gens du monde entier et de cultures différentes.


Nos émotions sont la météo de notre intérieur : depuis le balcon de notre coeur, elles influencent chaque seconde de notre journée la rendant belle ou triste, enjouée ou ennuyeuse…Elles sont aussi dans l’élaboration lente ou tumultueuse de l’interaction créant de l’adversité avec l’autre ou un lien d’amour naissant. Et elles peuvent aussi surgir des quatre coins de notre corps pour nous raconter qu’il ne faut pas oublier de prendre soin de nous.

Être attentif à la dimension émotionnelle qui nous constitue tous peut être une fenêtre vers plus de compréhension et d’ouverture sur notre monde intérieur. De ce chemin peut germer plus de bienveillance pour soi et le monde…

.:. Accueillons nos émotions pour apprendre à être VIVANT .:.

 

Charlotte

01/05/2022


(photo Charlotte Vergori)


Article 23 : Assise à l'ombre des autres

Lorsque mon Âme se heurte violemment à l’obscurité de l’Homme, je cherche désespérément dans la souffrance du monde la beauté cachée. Cette souffrance n’est pas la plus terrible. Ce sont les ombres qui gravitent autour de nous lorsque nous sommes à terre. Ces ombres prennent racines dans la négation de nos pensées : le manque d’estime, le désespoir, la culpabilité, la colère…

Alors, je m’assois au pied d’un arbre et je ferme les yeux. Toutes ces ombres sont accablantes car elles sont dépourvues d’amour. Finalement, la mort n’est pas la pire tragédie de ce monde. Mais c’est quand l’amour s’en va…Car il laisse derrière lui un désert aride dépourvu de joie et de vie. C’est comme ça que le cœur de l’Homme s’anesthésie de tout et s’éteint avant même que la mort n’est stoppée ses battements.

Assise au contact de la nature, mes pensées vagabondent et j’invite mon cœur à se souvenir : je me supplie de ne jamais oublier l’émotion d’être en vie et le sentiment d’aimer. Ils ne savent plus, eux, ces Hommes…ces Hommes qui ont oublié le bonheur de ressentir de la sécurité au contact d’une autre existence humaine : un bonheur permettant de trouver au creux d’une autre vie, une maison, pour y déposer son cœur fatigué et sa tête alourdie par la douleur de vivre. Ces hommes, tels des pantins articulés, ont effacé de leur pas ignorants l’amour et l’humanité de leur essence même.

Près de cet arbre je regarde le ciel : ce n’est pas la distance qui divise le monde et les liens mais c’est le silence et l’égocentrisme qui nous déconnectent de tout. Cette prison intérieure, dont chacun possède pourtant la clef, garde en otage l’Être émotionnel et pleins de vie que nous sommes. Ainsi, chaque Homme demeure désespérément enfermé dans l’ombre de lui-même et la perdition de sa propre existence s’il n’ouvre pas la porte…

 

A travers le ciel,
j’implore chaque nuit pour que le monde reconnecte toute sa bonté
en sollicitant chaque Homme de suivre son étoile…

Et je prie pour trouver « mes gens », ces personnes avec qui je pourrai partager
le même monde de profondeur et de bienveillance…
et marcher à leur côté jusqu’à la fin.


Charlotte, 2022

Photo Charlotte Vergori


Article 22 : A tout hasard

 

Au gré des expériences et au fil des rencontres, je me suis souvent interrogée sur la notion du hasard : existe-il vraiment ? A-t-il une place dans les événements de la vie qui nous traversent ? 


Dans le langage courant, on entend souvent dire : « c’est le destin », « quelle coïncidence », ou encore « je l’ai rencontré par hasard ».

Tout au long de mon cheminement, je m’aperçois que tout ce que l’on vit en tant qu’humain a, en fait, un véritable sens et des informations précieuses à nous révéler sur nous-même. Cependant, il faut souvent du temps pour le décrypter. Et sûrement un peu de courage, de patience et de foi en la vie… Mais si on accorde une attention particulière à ce qu’il se passe dans nos vies, des miracles de compréhension peuvent naître progressivement à l’intérieur de soi, telles des petites fenêtres que l’on ouvre timidement vers un regard plus aimant envers soi-même et le monde.

Dans ma réalité personnelle, et qui n’engage que moi bien-sûr, je pense que le hasard n'existe pas : ni dans aucun évènement, ni aucune rencontre de notre vie. Je dirai même que le mot "hasard" a été inventé par l'humain pour éviter l’inconfort de se positionner lorsqu’il se sent dépasser par ce qu’il vit et ressent. Je m’aperçois de plus en plus que dans nos réactions spontanées face aux difficultés, il nous est plus facile de dire que ce sont les autres qui sont responsables de nos problèmes et que c’est à cause des épreuves de la vie que nous souffrons. A travers cette vision fermée de l’existence, nous nous disons alors que nous n’avons pas d’autres choix que de subir car « c’est la vie » comme on dit...

La problématique en pensant de cette façon, c’est que l’humain se victimise pour ne pas avoir à affronter ce qui le dérange en profondeur :

- cela bloque ses mouvements pour avancer en conscience,
- cela emprisonne son élan naturel pour aller de l’avant,
- cela envahit de peur sa profondeur d’amour pour laquelle il est né…


Il se paralyse et se noie dans les ruminations, le ressentiment au lieu d’enlacer de tout son corps et de tout son cœur l’expérience terrestre qu’il lui ait proposé de vivre depuis sa venue au monde.

Ainsi, il n’y a plus besoin de faire d’effort ni d’essayer de s’armer de courage si nous pensons que nous n’y pouvons rien et que seul l’extérieur est responsable de notre désarroi…L’humain se dit alors qu’il y a juste à attendre, dans son périmètre de connaissance et de confort, que l’orage passe…Mais en fait, en étant dans l’évitement et en accusant la vie, les nuages restent gris à l’intérieur de soi. L’orage, un jour, ne gronde plus mais une pluie de larmes finit éternellement par ressurgir dans nos yeux.

Bien-sûr, toute cette prise de conscience n’est pas sans douleur. Ce n’est pas un chemin aisé à emprunter : il demande avant tout de la bienveillance envers son humanité maladroite mais dont le potentiel à révéler peut être si grand en s’accompagnant courageusement pour prendre les rênes de son existence…et je pense que le premier sens à donner à sa vie se trouve là, à ce point de départ précis.

Nous n’avons pas de pouvoir sur les événements extérieurs. Mais nous avons un talent unique pour affronter les aléas du quotidien qui nous assaillent parfois avec tant de violence : c’est notre faculté de pouvoir penser. Dans cette démarche, nous pouvons alors initier un pas vers plus de conscience et ce pouvoir intérieur nous permettra d’accéder progressivement à la connaissance de soi. C’est dans cette issue que les événements de la vie pourront alors prendre un autre sens : par ce qu’ils nous imposent, nous pouvons reprendre le dessus grâce à la réflexion. Effectuer un travail d'introspection, chercher courageusement la compréhension de ce qu’il nous arrive, amorcer le changement quand il est nécessaire, se regarder sans masque, s'engager avec confiance dans une relation pleinement... C’est là notre responsabilité en tant que vivant. C’est comprendre que le cheminement vers la vie et l'amour demande un don de soi, des efforts et beaucoup d’énergie.

Tout a une raison d'être, même si le sens de ce que l'on vit n'est pas toujours saisissable sur l'instant. Avec de l'espérance et de la persévérance, même ce qui est douloureux dans notre vie finit par montrer une face cachée plus douce et par révéler un apprentissage derrière la violence de ce qu’on a pu vivre au départ. Et on finit par se libérer petit à petit du poids du passé...Un passé qui restera en nous, certes, mais sans nous écraser cette fois : écouter avec le cœur ouvert ce que la vie veut nous raconter.

Et au cours des événements, on fait des rencontres : elles ont, elles aussi, une signification d’existence dans notre vie. En effet, les autres agissent en nous comme un effet miroir de nos forces et de nos limites. L'interaction, quelle qu'elle soit, est un cadeau pour apprendre qui nous sommes...Vraiment, c’est une chance. Certaines personnes ne seront que de passage mais d'autres resteront auprès de nous. Peu importe la durée, toutes les rencontres sont importantes à vivre. Accueillons-les :

- il y aura des gens qui vont nous bousculer afin de nous remettre en marche vers une vie qui nous ressemble davantage,

- il y en aura qui déclencheront en nous de la souffrance pour nous faire réfléchir sur nos blessures alors réveillées,
- il y en aura qui seront des véritables miracles d’amour...

Ces dernières, seront des rencontres plus singulières et peu communes. De nature plus rares, elles nous toucheront en plein cœur et de façon inexplicable, nous redonnant foi en la vie, en nos possibilités. Des rencontres qui nous aideront à retrouver la lumière dans le noir et à identifier ce que nous avons de beau en nous. Ces rencontres-là sont uniques dans notre parcours d’humain, elles sont de vraies relations d’amour inspirantes et de véritables cadeaux de la vie dont il faudra prendre soin…

L'important, à mon sens, est de garder en tête qu’on a une responsabilité en tant qu'humain : d’abord envers l'autre dont la vie est précieuse mais, avant tout, on a une responsabilité envers soi-même car chacun de nous est l'acteur de sa vie et de son bonheur. 


« Le responsable de ta précieuse vie, c’est toi.

Alors fais-en bon usage. »

 

Charlotte, avril 2022






Article 21 : " Existe-en-ciel "

Quand j'étais enfant, les questions existentielles jaillissaient bruyamment aux quatre coins de ma tête. Une véritable zizanie ! Je me confiais à mes ours en peluches : ils étaient silencieux mais, au moins, j’avais la douce impression d’être écoutée. 
Un jour, dans le flot de mes interrogations, une question attira plus particulièrement l’attention de la petite fille que j’étais alors :

« Mon Cœur, celui qui permet d'aimer tant de choses et de gens différents, est-il toujours au même endroit ? »

Au-delà de la naïveté qui m’enveloppait précieusement à l’époque, témoin de la présence de l’enfance en moi, c’était une vraie question à mes yeux et elle avait une importante capitale. Les sentiments, les émotions, la curiosité, la peur, les désirs, les palpitations…Je le sentais s’exprimer partout ce Cœur et de mille et une façons. 
C’est alors que j’ai commencé à chercher, au fil des âges, des bribes de réponses à une interrogation compliquée pour les adultes qui m’entouraient mais très censée pour l’enfant que j’étais et qui n’aspirait qu’à dialoguer avec la vraie nature des Hommes. 
J’ai trouvé une première piste de réflexion lors de mes études à l’école : j'ai appris en cours de Sciences Humaines que, oui, le Cœur reste toujours au même endroit : dans la poitrine, à gauche. Il pompe la vie. Et quelle puissance ! Il semble si fragile et si fort à la fois. Même quand le corps se dégonfle face aux difficultés, le Cœur, lui, courageusement gonfle…et il bât, même quand il se retrouve seul face aux tempêtes de l’existence.

Cependant cette réponse ne m’a pas suffi. Elle était si pauvre face à la complexité de ce que je ressentais…Du coup, j’ai continué à chercher. Mais ma quête s’est avérée souvent décevante car les adultes que j’interrogeais durant mon enfance n’avaient que des paroles distantes et superficielles à me donner. Ma question leur semblait amusante derrière leurs pas pressés que je n’arrivais pas à suivre avec mes petites jambes : ils piétinaient chaque jour leur vie sans jamais respirer. Les adultes se sont délectés de ma naïveté. Et cette question a commencé a déchiré Mon Cœur. Y-avait-t-il quelqu’un pour m’écouter ?

Alors j’ai interrogé les Livres : eux, ils sont affectivement moins radins et ont eu la patience de donner du sens à ma question existentielle sans les regarder avec des yeux de merlan frit ! Oui, il faut le dire, on a sacrément sympathisé eux et moi. Ils m’ont conté pleins d’histoires et encore aujourd’hui, ce sont de merveilleux amis. Comme quoi, les relations d’amour sincères existent. Celles qui ont un goût d’éternité…

C’est ainsi que j’ai été invitée dans leur maison enchantée. Ils habitent « rue de La Bibliothèque ». A chaque visite, les Livres m’ont ouvert leur monde riche et merveilleux. Quel privilège ! Mon Cœur est tout simple pourtant, il n’a rien d’extraordinaire. Mais les Livres m’ont offert des trésors de bienveillances en me racontant combien j’étais unique à leurs yeux. Et précieuse. 
Grâce à eux, j’ai pu trouver des étincelles de sens à ma question de petite fille : alors voilà, Le Cœur vit dans des milliers d’endroits différents, sans habiter vraiment nulle part. Le Cœur a milles visages s’adaptant ainsi à la complexité de ce que nous sommes.

Quelle fabuleuse découverte je faisais ! Grâce à cette compréhension, j’ai pu rendre visite à Mon Cœur maintenant que j’avais trouvé toutes ses cachettes. J’ai d’ailleurs beaucoup voyagé à l’intérieur de moi et j’ai trouvé Mon Cœur dans tous ces endroits ;

-          Il peut se blottir dans ma gorge quand je suis émue.

-          Il peut nouer mon estomac quand j'ai peur.

-          Il peut tomber dans mon ventre quand je suis bouleversée.

-          Il peut vouloir sortir de ma poitrine quand je ressens beaucoup d’amour.

-          Il peut changer d’émotions au gré de mes pensées quand je contemple le monde.

Autant vous dire que ces visites n’ont pas été de tout repos ! Mais, ce jour-là, je dois l’avouer, Mon Cœur m’a sacrément impressionné : en son creux naissaient de multiples sentiments qui circulaient dans tous mon corps et me permettaient ainsi de découvrir et de ressentir les différentes nuances de la vie.

Puis, une fois adulte, j'ai pris Mon Cœur pour le poser dans d’autres humains. Malheureusement, il revient souvent un peu cabossé. Mais j’essaie de ne pas trop m’inquiéter car Mon Cœur est toujours lui quand même. Je me dis qu'il est même encore plus beau comme ça. Car il sait aimer passionnément. 

Mais cette beauté, je n’en ai pris conscience qu’après beaucoup beaucoup de temps car il m’a fallu auparavant affronter encore pleins de nouvelles questions qui sont venues habitées les quatre coins de ma tête. Alors j’ai dû reprendre ma quête pour chercher des nouvelles réponses. C’était reparti !

La quête fût plus longue cette fois : l’adulte est moins confiant que l’enfant qui, lui, est tourné plus naturellement vers la vie. J’ai quand même fait des petits pas et grâce à ce chemin de compréhension, des notes de sens sont venues câliner la douleur qui a cabossé parfois Mon Cœur avec un sacré entêtement. C’est un voyage intérieur qui est long. Il faut affronter de gros orages. Mais, à l’horizon, j’ai pu apercevoir la douceur des levers de soleil qui apaisent certains chagrins d’existence. Pas tous…Une grosse larme au bord du cœur peut rester. Inconsolablement demeurer. C’est comme ça. Nous sommes humains, c’est tout. 
D’ailleurs c’est là que j’ai découvert un nouvel ami : il s’agit du Temps. Il travaille pour nous et il nous chuchote à l’oreille qu’on peut continuer à marcher malgré tout car il restera avec nous jusqu’au bout.
Mais, une nuit, il a fait très froid. Sans prévenir, un jour terrible est arrivé : Mon Cœur s'est affaibli de tout…La Vie était partie se recharger ailleurs. Je lui en ai voulu. Beaucoup. Mon Cœur ne laisse jamais tomber personne lui ! Il bât tout le temps sans exigence envers le monde à part celle d’avoir un peu de place pour exister…Ce départ semblait injuste. Mais il l’aime très fort cette Vie alors il a mis pleins de pansements sur sa colère et il a repris le chemin de la quête, encore une fois. 
Malheureusement, cette quête-là fût plus longue encore que toutes les autres. Je peux même dire qu’elle a été déchirante. Mon Cœur s'est épuisé à chercher la Vie partout.

-          Il a été interrogé un souvenir en s’exposant à la douleur du manque.

-          Il a respiré un parfum d’antan en affrontant l’odeur de la nostalgie.

-          Il a questionné le regard d’un passant en se heurtant à la froideur du monde.

-          Il est même allé fouiller dans le passé s’adressant courageusement à ses blessures d’autrefois...

Mais rien…La Vie demeurait introuvable. Pendant que le chagrin prenait racine dans mon Cœur, c’est sa voisine, la Mélancolie, qui s’est proposée de prendre la chambre d’amis. 
Alors, trop fatigué, il a lâché. Pas abandonner, non, ça jamais ! Plutôt mourir ! Mais Mon Cœur a lâché prise sur ses attentes et il s’est occupé un peu de lui. 
De temps en temps, la Mélancolie lui tenait compagnie pour boire un thé chaud le soir sur le canapé. D’ailleurs, elle n’est pas aussi désagréable que les Humains le disent et elle peut même nous aider à nous comprendre. En l’écoutant, j’ai compris que la Mélancolie a en fait le même besoin très fort que tout le monde : celui d’être aimé. 
Petit à petit, on s’est apprivoisé et elle a rejoint mon cercle d’amis : avec les Livres, Le temps et La Mélancolie, nous formons une sacrée équipe ! J’ai de la chance de les connaitre. Nous sommes tel un quatuor musical qui apprenons par nos similitudes et nos différences à jouer tous ensemble la mélodie du moment présent plutôt que celle du futur qui n’est pas encore née et qui intéresse tant les Humains. On a découvert de l’apaisement comme ça. Mon Cœur a été chouchouté fidèlement par ces trois précieux amis que je remercie du plus profond de mon Être de rester à mes côtés contre vents et marrées. Et cette fidélité est si rare à rencontrer.
Puis un jour plus doux est arrivé. Je me souviens, c’était le mois du printemps : la nature s’était réveillée d’un long sommeil hivernal. Mon cœur avait grandi en se levant se matin là. Et un peu vieillit aussi. 
C'est là qu'un jour spécial a pointé le bout de son nez : un autre jour plus important encore que tous les autres. La mélodie du moment présent que nous avons joué si longtemps avec mes trois amis a été entendue : la Vie a regagné Mon Cœur…Quel émoi ! Il a débordé de tout mais surtout d’amour. La Vie était là et elle avait un goût délicieux que je découvrais pour la première fois.

Durant ce jour précis, j'ai réussi à atteindre le sommet de ma propre montagne intérieure. Un véritable exploit : m'aimer. Il faut dire que la Vie m'avait vraiment manqué. J’ai même osé lui dire.

Alors la Vie et Mon Cœur ont noué un lien particulier et unique au monde. Vous savez, ce sentiment puissant et indéfectible qui nous donne foi en ce que nous sommes. En l’ayant perdu, j’ai réalisé que je n’avais pas été assez attentive à la Vie. En me focalisant sur les lendemains lors de mes nombreuses quêtes de sens, je l’ai trop négligé et elle m’a confié s’être sentie oubliée. Je me suis excusée. Et c’est comme ça que la Vie a rejoint, à son tour, mon cercle d’amis si singulier. Pour vivre tous ensemble dans la simplicité précieuse du moment présent.

« Une nouvelle existence a commencé pour moi et Mon Cœur :

le reste de la Vie à nous aimer jusqu’au ciel. »

 

Charlotte, éternelle petite fille


* photo Charlotte Vergori


Article 20 : Le sens de la vie

Est-il possible de saisir un jour cet indomptable sentiment d'avoir enfin conquis le sens de sa vie ?

Lorsque la souffrance vient tambouriner à la porte de notre existence, elle interroge douloureusement le sens de notre présence ici-bas.
En écoutant l’écho de la douleur, j’ai longtemps pensé que s’interroger de la sorte permettait seulement au cœur qui souffre de trouver une échappatoire pour camoufler nos tourments intérieurs : chercher un sens à notre vie pour étouffer la peur de n’être rien sur terre…

Aujourd’hui, ce questionnement profond qui me hante depuis mon enfance m’offre une nouvelle compréhension : et si questionner le sens de notre vie était plutôt un véritable élan d’amour pour elle ? Non pas une fuite, mais une énigme à résoudre, pour donner un vrai sens à notre présence unique dans ce monde… En nous interrogeant sur notre existence, nous lui accordons de l’attention et de l’intérêt. Finalement, nous mettons de l’action dans le mouvement de la vie à travers nos pensées car nous questionner permet de prendre une direction, un chemin, pour marcher vers des projets personnels pleins de promesses. Et, au fond, quand nous cherchons le sens des choses, c’est que ça compte vraiment…

Entreprendre la quête du sens de notre vie pourrait même être une tentative instinctive, plus ou moins consciente, de construire un lien d’amour avec nous-même car il est si difficile de nous aimer…C’est normal, nous ne l’apprenons jamais : depuis l’enfance, notre vie est dirigée par l’obligation et le devoir de devenir quelqu’un coûte que coûte. Mais devenir qui au juste ? Celui dont rêve les autres ? Ou encore la société ? Il faudrait plutôt apprendre à revenir en nous pour découvrir notre propre humanité afin d’apprendre à l’accepter avec ses forces et ses limites et s’autoriser à tisser petit à petit un lien d’amour avec notre corps, notre esprit et notre vie. Il est primordial de découvrir et d’élaborer cette relation avec nous-mêmes.

J’ai entendu un jour que plus nous cherchions le sens de la vie et plus nous le perdions. Cependant, en nous questionnant sur son sens, je pense au contraire que nous nous offrons la possibilité d’aller au cœur de notre existence en comprenant qui nous sommes petit à petit…et donc en comprenant mieux sa vie.


  • « En m’interrogeant sur le sens de ma vie,

je lui accorde de l’importance.

  • En m’interrogeant sur le sens de ma vie,

je fouille en son centre tous les trésors qu’elle recèle.

  • En m’interrogeant sur le sens de ma vie,

je choisis de ne pas subir et je deviens acteur de mon existence unique.

  • En m’interrogeant sur le sens de ma vie,

j’écris ma propre histoire en me frayant un chemin vers plus de conscience. »


A mes yeux, cette question est un véritable positionnement plein de courage pour ne pas sombrer dans la douleur des évènements qui, parfois, nous aimante inévitablement. 
En cherchant le sens de notre vie, nous allons vers nous-mêmes, nous entreprenons la quête de qui nous sommes et nous choisissons la vie. 
En nous interrogeant sur ce que nous sommes venus faire sur terre, nous devenons des chercheurs de vie. 
Et en étant un chercher de vie, nous pouvons découvrir que notre existence a du sens dans le moindre détail : lorsque nous observons les couleurs du ciel, lorsque nous échangeons un sourire, lorsque nous respirons à pleins poumons, lorsque nous élaborons un projet, lorsque nous aimons…Voilà où se trouve le sens de notre vie : il est partout dans notre histoire d’être-humain.

Le sens de notre vie est unique, il en existe autant qu’il y a de personnes sur terre. Il se raconte au singulier. Et il se cultive chaque jour :

  • il est dans nos souvenirs passés témoin de ce courage que nous avons d’arpenté la vie,

  • il est dans le futur au travers nos rêves qui sont à construire,

  • il se trouve là, devant nos yeux, dans la gratitude de chaque instant que nous offre la vie.

Voilà ce qui fait sens : 
ce don qui est en chacun de nous et qui est celui de porter la vie. 

 

Charlotte, chercheuse de vie (janvier 2022)



* photo Charlotte Vergori