Les
expériences de la vie ne sont ni bonnes ni mauvaises. Elles sont.
Mais
lorsque leurs réalités nous percutent, les expériences se teintent
alors de la couleur de nos émotions : nos pensées font naître
en nous une floraison de ressentis accaparant notre corps tout entier
qui se met à nous parler.
Lorsque
l'événement nous rend heureux, nous nous laissons facilement
envahir par la joie et nous sommes bercés par son retentissement
doux et puissant.
Lorsqu'un
évènement nous fait souffrir, nous pouvons alors nous sentir
découragé, affaibli et même détruit par la vie.
Il
est important d’apprendre à écouter le langage de notre corps et
à observer cette agitation intérieure afin de mieux comprendre ce
qui nous anime en profondeur. Et pour ce faire, il est précieux de
pouvoir apprendre à se connecter à une capacité qui est en nous
mais que nous n’avons pas appris à développer dans un monde qui
prône le pouvoir et la compétition. Il s’agit de
l'autocompassion, une pratique d’inspiration bouddhiste.
L'autocompassion
pour reconnaître nos imperfections avec douceur.
L'autocompassion
pour envelopper nos fragilités avec de l’amour.
L’autocompassion
pour se dire que nous faisons, avant tout, comme nous le pouvons…
Lorsque
nous sommes face aux épreuves de la vie, nous résistons à une
partie de nous qui est plus sombre au lieu d’essayer d’écouter
ce qu’elle a à nous dire. En effet, nous portons en tant qu’humain
une dualité entre une ressource positive qui nous anime
naturellement mais aussi une part plus noire que nous dissimulons
coûte que coûte de manière plus ou moins consciente ce qui nous
demande beaucoup d’énergie. Mais cette ombre nous semble obscure
seulement parce-que nous avons choisi de la cacher et de la refouler
par peur de nous y confronter. Cela crée en nous une lutte
permanente et épuisante pour réprimer toute une partie de ce que
nous sommes.
Il
est important d’identifier que cette part moins valorisante de nous
est inhérente à notre nature humaine tout simplement. Nous sommes
faits de cet ensemble. Cette ombre n’est pas notre ennemie. Nous la
rejetons au lieu de l’accueillir ce qui revient à nier toute une
partie de nous-mêmes pour arriver à la fin de notre existence à ne
pas avoir réussi à nous comprendre : nous risquons de mourir à
la vie avant même que la mort nous attrape si nous n’avons pas ce
courage de nous reconnaître
tel que nous sommes véritablement. C’est ainsi que nous risquons
de passer à côté de notre vie en nous contentant de cohabiter avec
nous-mêmes plutôt que de nous engager entièrement avec tout notre
Être et de développer notre véritable nature unique.
Dans
un premier temps, il serait intéressant de regarder notre partie
sombre avec plus d’indulgence : sa noirceur serait alors moins
tumultueuse pour notre cœur. Dévoilée à la lumière de notre vie,
nous pourrions ainsi commencer à prendre soin d’elle et nous
serions surpris par des découvertes passionnantes que nous ferions
dans les tréfonds ensevelis de notre Être. Nous avons ce choix.
Garder
secrète cette part plus sombre de nous qui nous effraie et que nous
étouffons à chaque fois qu’elle essaie de nous parler d’elle.
Continuer à occulter, par peur, une partie importante de notre
personnalité et maintenir ainsi l’illusion de rester protéger
contre la souffrance.
Ou
alors,
accepter
d’entrouvrir doucement la porte pour éclairer une partie plus
fragile et inconfortable de nous mais qu’il est possible
d’apprivoiser. Car, oui, c'est bien en étant complet que nous
sommes humains. Nous ne sommes pas digne d'amour seulement parce-que
nous valorisons notre côté lumineux aux yeux du monde extérieur :
nous en sommes digne car nous osons ÊTRE. Et c’est cette
authenticité qui attirera à nous l’amour dans tout ce qu’il a
de plus vrai et de plus noble.
Pour
parvenir à admettre et à accueillir cette ombre qui nous façonne
tout autant que la lumière, éveillons en nous ce don merveilleux
que nous pouvons nous faire : grâce et avec l’autocompassion,
cette merveilleuse indulgence, cajolons nos souffrances cachées.
Apaiser la peur, écouter la douleur, offrir le pardon à nos erreurs
d’humains…pour dépoussiérer les
recoins de
notre cœur qui a porté trop longtemps nos déboires d’existence
non assumés.
L’autocompassion
peut nous permettre d’accéder à cette grotte humide de tous nos
chagrins retenus et qui crée cette obscurité : il s’agit en
fait de l’enfant blessé que nous avons été, jadis, et qui n’a
pas toujours pu être écouté et choyé. Ces non-dits de l’enfance,
accumulés au fil des âges, ont laissé une partie de notre Être à
la dérive.
L’autocompassion
peut apporter de la bienveillance à l’adulte que nous sommes pour
réparer petit à petit l’enfant dévalorisé qui demeure
recroquevillé en nous et qui est emprisonné alors que lui ne
demande qu’à vivre. Cet enfant parle régulièrement derrière nos
émotions d’adultes, celles qui sont parfois fortes et démesurées.
Il demande notre attention : accordons-lui enfin cette
faveur car il la désire depuis si longtemps et nous découvrirons
enfin qui nous sommes. L’adulte n’est pas supérieur à cet
enfant. La croyance limitante que seul l’adulte a la capacité
d’apprendre à l’enfant comment vivre nous a éloigné de cette
possibilité d’apprendre l’un de l’autre en toute égalité. Et
notre enfant intérieur réclame aujourd’hui cette justice.
Offrons-lui ce cadeau et nous nous offrirons la liberté d’Être.
Apprenons à décoder le langage de nos émotions. Quand l’adulte
souffre, son enfant intérieur tente de communiquer et de révéler
des clefs de compréhensions.
Découvrir
que derrière un reproche, il y a un besoin à nourrir.
Identifier
que derrière une attente, il y a un besoin de partage.
Apercevoir
que derrière un silence, il y a un besoin d’écoute.
Comprendre
que derrière un rejet, il y a un besoin de présence.
Sentir
que derrière une colère, il y a un besoin d’amour.
Il
faut absolument modifier notre regard sur nous-même car nous ne
sommes ni tout blanc, ni tout noir. Nous SOMMES et c'est tout. Avec
nos tourments et nos bonheurs, nos limites et nos trésors. Il est
impossible en tant qu’humain d’être parfaits, de toujours faire
les choses bien, de réussir du premier coup tout ce que nous
entreprenons…C'est juste impossible ! Quelle dureté de
s’infliger autant de pressions et d’exigences…
Et
tant mieux si nous n’arrivons pas toujours au but souhaité :
que pourrions-nous comprendre du chemin d’existence ? Plonger dans
notre profondeur demande une pause sur le chemin, un obstacle qui
nous arrête afin d’entrer dans notre intérieur. Au lieu de
regarder devant, la vie nous demande alors de regarder dedans. Pour
cela il faut repenser au plaisir de pouvoir découvrir, modifier,
perfectionner, cheminer...sur place. Pas demain mais maintenant.
Allons
faire connaissance avec nos petites failles qui nous arrêtent et sur
lesquelles nous trébuchons ...avant de reprendre la route. Ce
temps ne sera pas perdu. Bien au contraire. Contempler notre âme
pour mieux visualiser la vie que nous désirons vraiment.
Finalement,
nous pourrions gagner un temps précieux. Celui de savourer les
moments présents et comprendre véritablement vers quelle
destination nous souhaitons diriger notre barque plutôt que de
marcher sans réfléchir avec le poids de nos chagrins qui
s’accumulent sans leur donner du sens.
L’autocompassion est
la clef.
Elle
nous permet d’accepter que, parfois, notre vie puisse être
nulle...sans fatalité et sans aggraver les choses. Elle nous aide à
admettre avec bienveillance que ça ne marche pas toujours et que
nous n’y arrivons plus. Et
tout cela
ne veut pas dire que c’est fini. Au contraire, cela peut être le
début d’autre chose dans notre histoire personnelle. Et cette
bonté que nous nous offrons alors nous apporte le courage de ne pas
nier notre souffrance mais juste de la considérer comme
naturelle lorsqu'elle prend place en nous. Car la souffrance fait
partie de la vie elle aussi. Cette légitimité que nous lui
apportons nous permet de la reconnaître
puis d’initier un dialogue intérieur pour tenter de conjuguer avec
ce qu’elle a à nous enseigner : elle née souvent de la
comparaison entre nos idéaux et la réalité. Le fait de ne pas
accepter que les choses se passent comme elles se passent, voilà ce
qui créé en partie cette souffrance. Car plus nous résistons à
ce qui se déroule ici et maintenant, plus nous souffrons. Et
résister contre nous-même revient à lutter contre qui nous sommes.
Lâcher prise sur nos idéaux est une première issue. Cela ouvrira
une porte vers un apaisement que nous méritons car nous n'avons pas
à avoir honte de notre humanité qui peut être parfois bancale et
fragile. Cette vulnérabilité en nous permet d’ouvrir des portes
précieuses comme la bienveillance, l'altruisme et l'empathie :
des valeurs humaines à développer pour une vie plus harmonieuse
avec soi et les autres.
« Tu
peux être fière de toi et du chemin que tu as parcouru jusqu'à
maintenant.
Malgré
les tremblements de terre tu t’accroches. C'est un chemin très
courageux tu sais…
Alors
surtout, continues comme ça. Promets-le-toi.
Car
tu es ta plus grande histoire d’amour. »
Charlotte,
le 14/11/2021
«
Je me pardonne pour tous mes échecs en tant que soignante… »
« J’apprends
à pardonner chaque jour ma
maladroite humanité. »
* photo Charlotte Vergori